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Ultra Marathon France : une association, une revue, un blog, un club

dimanche 19 novembre 2017

Michel Morel aux 24 Heures de Saint-Laurent-du-Pont

Michel
Adhérent à l'UMF et futur licencié (la saison prochaine), j'ai couru les 24 Heures de Saint-Laurent-du-Pont les 16 et 17 septembre 2017.
J'ai choisi cette épreuve cette année parce qu'elle n'attire pas les coureurs élite et qu'elle est donc gagnable (comme Liège en 2014). C'est certes un peu égoïste de choisir une course dont les marques des dernières années sont assez modestes, mais se faire acclamer comme premier est très grisant. Et puis se frotter aux meilleurs une année sur deux et choisir une course plus modeste l'autre année me semble une bonne mesure pour un coureur moyen (même si ce format me réussit bien).

En fait, j'ai été puni de mes prétentions car deux coureurs capables de faire mieux que moi (et de dépasser les 210 km) étaient présents cette année, Frédéric Noël et Yannick Legay. Ce n'était pas vraiment une punition car leur présence a rendu la course palpitante. Il se trouve en outre que nos tables personnelles étaient côte à côte et que j'ai pu sympathiser avec Yannick avant la course.

Yannick et Frédéric
Mon plan de course est de marcher durant 100 m, deux fois dans le tour (de 1050 m) et de courir le reste de temps, soit 25 % du temps à marcher et 75 % à courir. Les zones de marche sont choisies de préférence dans les faux-plats montants. La vitesse moyenne de début est de 9,2 km/h, celle de fin de 8,2 km/h si possible. Isa prépare mes bidons à l'avance, un avec de la soupe de légumes, un avec du jus de fruit, en alternance toutes les heures. Qu'elle soit remerciée pour cette aide inestimable qui me fait gagner un temps précieux ! Frédéric part comme une flèche et me prend plus de 1,5 km par heure les premières heures. Yannick, plus prudent, me prend environ 0,5 km par heure. Il y a d'autres coureurs insérés entre nous au début, mais manifestement imprudents. Chaque fois que Yannick me prend un tour, nous discutons pendant un tour. Après quelques heures de course, nous nous amusons du second, un jeune qui reste rivé sur son smartphone tout en courant, il faut le faire ! Nous nous doutons bien qu'il ne tiendra pas dans la durée. Après avoir flanché, il effectuera tout de même le reste des 24 Heures en marchant, preuve d'une persévérance certaine. Toujours rivé sur son smartphone, bien sûr.
Sur un 24 Heures, on finit, sinon par connaître, au moins par reconnaître, la plupart des coureurs. Une femme qui danse sur la piste pendant des heures avant de rentrer dans le rang, visiblement fatiguée, mais qui remet cela le lendemain matin après un peu de repos. Un couple, Pierrette et Pierre, qui chemine ensemble durant toute la course. Un coureur plié en deux, mais qui finit mieux qu'il n'a commencé. Un autre qui penche d'un côté. Une toute jeune avec son prénom sur son maillot. Et bien d'autres qu'on reconnaît de loin, à leur silhouette, à leur démarche. Sans parler des officiels et bénévoles, tout sourire, qui nous acclament jour et nuit.
Vers dix heures de course, il fait nuit. Yannick me signale que Frédéric commence à mollir. De fait, il progresse moins vite et ne lui prend plus rien. Pendant une heure ou deux, je remarque un étrange petit jeu : dès que Yannick arrive à la hauteur de Frédéric pour le doubler, ce dernier accélère et reprend 100 m, tandis que Yannick accélère pour essayer de ne pas se laisser distancer. Je me dis qu'à ce petit jeu, l'un et l'autre vont "s'user" prématurément. 



A mi-course, j'ai parcouru 108 km et la forme est encore assez bonne. Mais, malgré l'effort, ma vitesse de course diminue à une valeur inférieure à celle souhaitée. J'essaie des accélérations (courtes et prudentes) pour relancer la machine, ce qui fonctionne pendant un temps. Certains appellent cela le super-Cyrano. Frédéric a un peu lâché prise. Il ne me double plus et Yannick lui reprend un tour de temps en temps. Peu après, il passe premier et je commence à prendre du terrain à Frédéric. Le parcours est presque plat mais nettement moins facile que je ne le croyais, malgré des virages relativement larges. Trois virages à angle droit vers la gauche sont en dévers. Le pied droit se pose bien, mais le gauche se serre du côté interne de la chaussure. Une grosse ampoule au talon apparaît. Je décide de l'ignorer et de ne pas modifier ma foulée. Avec raison car après une demi-heure, la douleur disparaît. Idem avec une violente douleur au petit orteil du même pied et probablement pour la même raison. Elle finit aussi par disparaître.
Après 16 heures de course, j'ai tout repris à Frédéric et je passe deuxième, à 6 tours de Yannick. Mais, maintenant, c'est lui qui paie les efforts du début. Il ne me prend plus rien et je reviens tout doucement. En fin de nuit, je remarque un léger mieux, comme souvent : la vitesse augmente toute seule d'un demi km/h, sans rien changer. Les hormones de la nuit, chargées de nous endormir, sont remplacées par celles du jour. Longtemps, je me demande si je vais pouvoir reprendre les 6 tours en 6 heures, car pour l'instant, le compte n'y est pas. Mais Yannick se met alors à marcher plus souvent. Il marche aux mêmes endroits que moi, lui qui disait que le Cyrano ne lui réussissait pas. Il marche aussi de plus en plus à d'autres endroits, ce qui fait que je le double de plus en plus souvent. Quand il est encore à un tour devant moi, je lui dis que s'il court maintenant, nous finirons ensemble, mais il me dit d'y aller, et qu'il va encore ralentir.
Je passe premier après 22 heures de course. C'est vraiment très excitant. Les bénévoles m'acclament. Même les coureurs m'acclament, comme s'ils avaient observé tout notre manège.
Je finis avec une marque de 207,2 km (ma meilleure), avec Yannick deuxième à 4 tours et Frédéric, qui s'est accroché jusqu'à la fin, troisième.
Ayant gagné une inscription pour les 24 H de l'Isère à Tullins en avril 2018, je pense y aller, avec toutes les chances de les retrouver tous les deux, car c'est leur région.

Amicalement

Michel

67 ans le 4/11/2017

Michel file vers la victoire avec une incroyable fraîcheur